mardi 17 janvier 2012

Au boulot, avec ou sans boucle d’oreille ?

Licencié pour avoir choisi de porter une boucle d’oreille, c’est ce qui est arrivé à ce chef de rang d’un restaurant gastronomique en métropole. La clientèle chic de l’établissement avait moyennement apprécié d’être servie par un homme portant des bijoux à l’origine destinés aux femmes. Mais la Cour de Cassation, à qui il appartenait d’en juger, a décidé, la semaine dernière, que ce n’était pas là un motif valable de licenciement, car discriminatoire par rapport au personnel féminin. Les juges ont estimé qu’il s’agissait là d’une sanction basée sur l’apparence physique et sexiste.




Pourtant, dans les écoles d’hôtellerie et de restauration, les élèves sont au fait de l’interdiction de boucle d’oreille chez les hommes. Raziah Locate, directrice du Centhor, centre de formation en hôtellerie-restauration, explique qu’il n’est pas concevable qu’un de ses élèves montre une apparence négligée même en cours. L’enceinte de l’établissement franchie, simplicité et discrétion de la tenue sont de mise. Pour les filles, on tolère un petit bijou discret à l’oreille, une petite chaîne, et une bague. Pour les garçons, ça sera juste une montre. Mais qu’est-ce qui justifie une telle rigueur autour de la boucle d’oreille, que ce soit dans le milieu de la restauration, de l’hôtellerie, chez le personnel navigant commercial des avions ou encore dans certains bureaux recevant des clients ? « Ce n’est pas vraiment une question d’hygiène, mais plutôt de bienséance et de savoir-vivre, en tout cas dans une salle de restaurant. La boucle d’oreille chez un garçon, ça fait pas clean », explique Raziah Locate. Tandis qu’une serveuse pourra se permettre un bijou discret. Discrimination ? Pas forcément pour la directrice du Centhor : « Les femmes ont toujours porté des boucles d’oreilles, ça ne choque personne. Chez un homme, ça fait plus atypique, ça attire l’oeil de façon négative. Si un serveur paraît ne pas avoir d’hygiène, vous n’avez pas envie de retourner dans le restaurant ».



A l’Hémisphère Sud, restaurant gastronomique de Saint-Denis, le responsable confirme l’importance d’une présentation irréprochable des serveurs, même s’il estime qu’un licenciement pour une bijou « paraît un peu fort et plus que discriminatoire ». L’un des membres de son équipe, qui porte un bijou à l’oreille, l’enlève systématiquement avant son service. « On n’est pas à l’armée non plus. Et tout dépend de l’établissement où vous allez. Dans un petit restaurant de bord de plage où les clients sont en maillot de bain, ça ne me choque pas d’avoir un serveur avec une boucle d’oreille. C’est peut-être une question de mentalité de la société, mais il faut apprendre à vivre avec son temps ! ». Serveurs et cuisiniers ne sont pas les seuls à se voir interdire ces originalités dans leur style. D’autres corps de métiers sont également interdits de boucle d’oreille. Chez les gendarmes, leur condition de militaire limite leurs extravagances. Dans la police nationale toutefois, celui qui n’est pas soumis à l’uniforme n’est pas non plus soumis à l’interdiction du bijou d’oreille, contrairement à son collègue masculin sur le terrain. « C’est dans le règlement intérieur. Car en cas de prise à parti avec une personne récalcitrante, on peut arracher le lobe de l’oreille provoquant une douleur, et une perte de contact. C’est une question de sécurité », explique un agent. A moins d’y être contraint pour des raisons de sécurité donc, si vous hésitiez encore à vous montrer au bureau le lobe orné, rassurez-vous messieurs, vous ne craignez pas le licenciement ! ■



Johanne Chung To Sang

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